L’incroyable histoire du smiley

L’histoire du Smiley est folle. D’un papa américain, Harvey Ball, elle est devenue une création française avec Franklin Loufrani puis Nicolas Loufrani.

Le podcast sur l’histoire du Smiley

La biographie sur l’histoire du Smiley

  • 1963: Création par Harvey Ball, graphiste américain du premier Smiley pour une société d’assurance
  • 1972: Franklin Loufrani, un ancien journaliste, lance pour France Soir le Smiley et dépose sa création à l’INPI
  • 1975 – 1990 : Malgré son incroyable succès, le Smiley de Loufrani tombe dans l’oubli quand il devient un symbole des soirées Rave
  • 1997 : Nicolas Loufrani s’associe avec son père et ils créent la Smiley Company
  • 1998 : création de l’émoticon pour internet et nouveaux designs du Smiley
  • 2021 : The Smiley Company, installée à Londres, c’est 45 salariés et 350 millions d’euros de CA

L’histoire du Smiley résumée

L’histoire du Smiley, le petit rond jaune souriant, commence en 1963 aux États-Unis avec Harvey Ball qui dessine cet emblème pour une société. 

C’est pourtant, un français, Franklin Loufrani, un ancien journaliste et publicitaire qui propose ce petit rond jaune souriant à Pierre Lazareff, le patron du quotidien, France Soir, en 1972. Il en fait sa une le 1er janvier. Un carton.

Franklin exploite alors son Smiley partout et surtout il le dépose dans le monde entier. Le Smiley devient officiellement une invention française. 

Mais après être devenu le symbole des Rave et de l’Ecstasy, il est abandonné par Franklin avant que son fils, Nicolas Loufrani, ne reprenne les rênes du projet en 1997. 

Avec succès quand il crée les émoticônes pour internet et surtout humanise le Smiley. Un succès monumental.

La Smiley Company, basée à Londres, c’est désormais 45 salariés pour 350 millions d’euros de chiffres d’affaires.

Le fils a dépassé le père. Harvey Ball, lui, n’aura jamais profité de son invention. 

L’incroyable histoire du smiley

Bureaux de France Soir, Paris, décembre 1971.

Pierre Lazareff

“Franklin, viens voir.

Bon, faut remonter le moral des troupes. 

Les Français font la gueule, jamais vu un décembre aussi morose, faut faire quelque chose.

 Trouve moi une idée pour redonner du punch.”

Franklin Loufrani

“Mmmh…

Passe-moi un crayon Pierre”

Franklin Loufrani

“Allez,  imprime-moi une Une de bonnes nouvelles et ajoute ce dessin avec. 

Tu veux redonner le sourire aux Français? 

Alors fais déjà sourire France Soir”

Un rond jaune, deux yeux, une bouche… 

C’est ce dessin , comme un petit sourire, que Franklin Loufrani conseille au patron de France Soir, Pierre Lazareff, d’afficher à la Une du quotidien du 1er janvier 1972. 

Ce petit sourire, c’est le smiley. Un petit sourire dont la popularité deviendra grande, très grande!

Je vous raconte aujourd’hui l’incroyable histoire du Smiley, qui d’un symbole d’optimisme à un empire commercial a fini par devenir un véritable emblème mondialement connu.

L’incroyable histoire du smiley

L’origine du smiley : un inventeur américain

Une voix d’homme

“Vous allez rire, vous allez pleurer, vous allez aimer.”

Nous sommes  le 10 mars 1953 à New York. Le symbole du smiley apparaît pour la première fois dans le journal New York Herald Tribune.

A la page 20 du quotidien, en noir et blanc, un rond qui sourit, un rond qui pleure et un cœur qui soupire accompagnent la publicité de la comédie musicale Lili de Charles Walters.

Mais il faut attendre 1963, pour qu’un certain Harvey Ball donne au Smiley sa touche jaune et un semblant de paternité. 

Voix d’homme

“Monsieur Ball, je suis le directeur de la société d’assurances “State Mutual Life Assurance Company”. 

Voilà, le moral de mes employés est en berne. J’aimerai leur redonner le sourire.” 

Ancien militaire pendant la Seconde Guerre mondiale, Harvey Ball est graphiste et dessinateur au sein d’une entreprise publicitaire. 

Penché sur sa table à dessin, une feuille jaune attire son attention. 

Harvey

“Jaune… si je dessine un rond, ça fait un soleil.

C’est chaleureux, un soleil… et si je faisais un soleil qui sourit… ou juste un rond jaune qui sourit.. ouais pas mal ça..”

La compagnie d’assurances est conquise. Elle fait imprimer ce rond jaune souriant et lumineux sur les cartes de visite et posters distribués aux employés et aux clients de l’entreprise. 

L’incroyable histoire du smiley

Femme d’Harvey

“45 dollars? C’est tout ? Mais Harvey, où avais-tu la tête?”

Harvey

“Ce n’est qu’un petit dessin de rien du tout ma chérie. 

Un rond, deux points et une bouche.. Rien d’extraordinaire.” 

Femme d’Harvey

“Ta bonté te perdra mon Harv’”

Harvey reçoit en tout et pour tout la modique somme 45 dollars pour son petit bonhomme jaune. Il ne pense pas non plus à déposer le copyright. 

Alors que son pictogramme jaune continue de se diffuser massivement sur divers supports comme les tee-shirts et les porte-clefs, Harvey, n’en touche pas le moindre bénéfice…

Et en 1972, c’est de l’autre côté de l’Atlantique, à Paris, que ce visage rond va vraiment faire un heureux. 

L’incroyable histoire du smiley

Mais un businessman français

Suppression d’emplois, inflations, les nouvelles ne sont pas réjouissantes en cette année 1971. Les Français font la tête.

Dans les bureaux de France Soir, Pierre Lazareff, le patron du quotidien, fait appel à Franklin Loufrani pour plancher sur une campagne anti-morosité.

Pierre Lazareff

“Loufrani, viens voir.

Bon, faut remonter le moral des troupes. 

Les Français font la gueule, jamais vu un décembre aussi morose, faut faire quelque chose.

 Trouve moi une idée pour redonner du punch.”

Franklin Loufrani est un touche-à-tout doté d’une bonne dose de culot.  

Après avoir été journaliste à Europe 1 et à France Soir, il devient agent, en France, pour la Licensing Corporation of America, la première agence de licence de personnages. 

Comme Franklin est un très bon publicitaire doublé d’un bon sens des affaires, Pierre Lazareff se tourne naturellement vers son ancien journaliste pour lancer sa campagne anti-morosité.

Franklin

“Pierre, voici un rond, deux yeux, une bouche…”

Pierre Lazareff

“Mmmh et j’en fais quoi de ce rond ?”

Franklin

“C’est plus qu’un rond, c’est un sourire. 

Tu vas le mettre dans chaque rubrique du journal et tu vas illustrer toutes les bonnes nouvelles du jour avec ce dessin”

Et c’est ainsi que le  1er janvier 1972, France Soir  inaugure en première page une colonne baptisée « Prenez le temps de sourire » accompagnée de bonnes nouvelles et d’un grand smiley !

Et comme Franklin flaire le potentiel commercial de ce visage jaune tout sourire, il dépose sa version du logo à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI)

Il détient dès lors le copyright de l’œuvre et ses droits d’exploitation commerciale.

L’incroyable histoire du smiley

Un business amateur qui décolle puis tombe dans l’oubli

Franklin

“Pierre, par ici !” 

Franklin

“Un café?

J’ai eu une idée pendant la nuit. Maintenant que tous les médias reprennent le smiley, je me suis dit qu’il faut qu’on se lance dans le merchandising.

Je te propose de lancer des autocollants avec le logo pour tous les automobilistes de France.”

En partenariat avec RTL, la campagne est un succès. 12 millions d’autocollants sont vendus, Franklin touche deux centimes par vignettes. 

Puis il revend l’opération à d’autres journaux européens. 

S’ensuit la vente de 700 000 t-shirts floqués du logo dans les Prisunic et les Monoprix

Le smiley se décline du mug aux chaussettes dans plus de 70 pays sur une quarantaine de classes de produits. 

Franklin,

“Tout va bien derrière ? Tu m’as l’air bien concentré Nicolas ?”

Nicolas

“Mmh Pa’… tu sais qu’il y a le smiley dans la BD Watchmen que tu m’as offerte”

Franklin

“Talking Head, Watchmen, Monoprix, Prisunic… le monde me sourit”

Emblème de la pop culture puis détourné sur la pochette des albums des Talking Heads et de Nirvana,  le smiley illustre bientôt les soirées house, la scène rave et les cachets d’ecstasy… 

Ce qui ne plaît guère à certains partenaires qui veulent se détacher de cette image et préfèrent abandonner le smiley. 

Franklin décide alors de développer d’autres activités comme l’exploitation de Tom & Jerry ou Félix Le Chat. 

Le bonhomme jaune semble tomber aux oubliettes… jusqu’en 1997.

L’incroyable histoire du smiley

Nicolas Loufrani et la construction d’un empire

Nicolas, fils de Franklin, maintenant adulte

“Allô Papa

Je viens de me séparer de mes associés. 

Ils me l’ont fait à l’envers, je suis au fond du seau.”

Franklin

“J’ai bien une idée pour te remettre en selle fiston. ça te dirait de relancer le smiley ?”

Nicolas

“Papa, ton idée de smiley, c’est vieux et minable, c’est complètement dépassé. 

Déso mais sans moi”

Mais après trois expériences entrepreneuriales plus ou moins réussies, Nicolas se laisse convaincre par son père.

En 1997, père et fils s’associent  pour créer la Smiley Company ,basée à Londres où réside Nicolas. 

Et le fameux sourire jaune prend officiellement le nom de “Smiley”. 

À 26 ans, Nicolas devient CEO de l’entreprise ou plutôt, comme il aime l’afficher sur sa carte de visite : 

Nicolas

“Chef bien-aimé, Commandeur en chef des forces du bonheur et Grand maître de la loge du bonheur”.

Nicolas décide alors de personnifier le logo et de l’humaniser. 

Il dessine un Smiley en 3D et le dote de différentes expressions et de divers accessoires.

Franklin

“Nan mais qu’est-ce que t’as foutu? 

Un smiley qui pleure, mais t’as perdu la tête. 

Hors de question de toucher à la version originale.” 

Nicolas

“Papa, il faut se diversifier et rendre le smiley comme un vrai moyen d’expression. 

Le smiley, le smiley pleure, le smiley fait la gueule.

Laisse-moi faire !”

Nicolas développe un studio avec des chartes graphiques, des stratégies commerciales et créatives, le tout dans une optique de merchandising. 

Et la stratégie paye. Des contrats de licence sont signés partout dans le monde en passant par le textile jusqu’à l’agroalimentaire.

Puis le smiley se popularise encore avec l’émergence des téléphones portables et de l’essor d’Internet. 

Nicolas profite de la manne en éditant un Dictionnaire des émoticônes. Si les internautes peuvent utiliser les smileys à loisir, les entreprises doivent payer pour le faire, de même que les fabricants de téléphones mobiles.

Franklin

“Apple mériterait qu’on leur fasse un procès, les émojis c’est de la copie !”

Nicolas

“Du calme papa, leur licence est gratuite on ne peut rien faire…” 

Il faut dire que les tribunaux connaissent bien les Loufrani. Le père et le fils veillent au grain. Ils ont poursuivi les choco BN, AOL et Walmart

L’avocate de Walmart

“Mon client l’hypermarché Walmart tient à rappeler que le smiley existe depuis les années 1950 aux Etats-Unis.

Nous avons à faire ici à un droit d’occupation de la part de Monsieur Loufrani et non un droit de création. 

C’est inadmissible !”

Frank Loufrani

“Certes,  je ne suis probablement pas le premier à avoir dessiné un sourire, des hommes des cavernes ont dû le faire, mais moi je l’ai déposé et enregistré !”

Après une bataille de près de 10 ans, The Smiley World Company et Walmart réussissent à trouver un accord à l’amiable. 

Malgré les quelques déconvenues judiciaires, Smiley a toujours la cote!

En 2021, avec 45 salariés et 350 millions d’euros de chiffre d’affaires  et plus de 400 partenaires dans la mode, le design ou l’art, The Smiley Company semble avoir trouvé la formule magique du bonheur… 

Ou comme diront certains, la recette parfaite d’une OPA sur la joie de vivre…

L’incroyable histoire du smiley

Épilogue

En 2022, Smiley fête ses 50 ans. Un anniversaire en grande pompe organisé par les Galeries Lafayette du monde entier. Après deux ans de pandémie, le logo tout sourire s’affiche de nouveau comme le remède anti-morosité. 

The Smiley Company continue à se développer à travers l’univers des produits dérivés et du divertissement.

Quant à Harvey Ball, il n’aura donc jamais profité de son invention… ne l’ayant pas enregistrée.

Il meurt en 2001 à l’âge de 79 ans et sans amertume ni regrets.

Harvey

“Je ne peux manger qu’un steak à la fois et ne peut conduire qu’une voiture à la fois”

aime-t-il répondre aux journalistes qui l’interrogent sur la fortune qu’il aurait pu toucher. 

Son fils Charlie Ball crée The Harvey Ball World Smile Foundation, une fondation caritative pour tenter à sa manière de sauver l’œuvre de son père et poursuivre sa mission: redonner le sourire au plus grand nombre.

Et ça c’est une autre histoire.

L’incroyable histoire du smiley

Notes

https://www.youtube.com/watch?v=Cbt0LP9fH0w

https://www.konbini.com/arts/la-folle-histoire-de-linvention-du-smiley/

https://www.europe1.fr/technologies/retour-sur-la-creation-du-smiley-lancetre-de-lemoji-3467306

https://www.leparisien.fr/economie/business/qui-a-invente-le-smiley-son-histoire-va-vous-surprendre-09-05-2016-5777881.php

https://www.leparisien.fr/economie/business/qui-a-invente-le-smiley-son-histoire-va-vous-surprendre-09-05-2016-5777881.php

https://www.caminteresse.fr/societe/qui-a-invente-le-smiley-11115022/

https://www.nouvelobs.com/lifestyle/20220310.OBS55501/le-smiley-fete-ses-cinquante-ans-et-c-est-une-invention-francaise.html#modal-msg

https://www.capital.fr/votre-carriere/le-smiley-a-fait-la-fortune-de-cet-homme-1280552

https://www.vogue.fr/mode/article/smiley-anniversaire-50-ans-histoire-mode

https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/2017/08/07/37002-20170807ARTFIG00003-nicolas-loufrani-les-emojis-ont-copie-le-smiley.php

https://www.lesechos.fr/weekend/mode-beaute/smiley-50-ans-et-toujours-le-sourire-1385710

https://www.linkedin.com/pulse/lincroyable-histoire-du-smiley-une-fran%25C3%25A7aise-laurent-brouat/?trackingId=VGgjNam0R52td%2FVc9PAv6g%3D%3D

https://fr.wikipedia.org/wiki/Harvey_Ball

https://www.lefigaro.fr/societes/2010/01/05/04015-20100105ARTFIG00704-smiley-ou-l-histoire-d-une-opa-sur-un-sourire-.php